Eva Mazur, pair-aidante : « Aider, grâce à ce que j’ai vécu »
- Zélie
- il y a 20 heures
- 3 min de lecture

Eva Mazur, 37 ans (photo), est médiatrice de santé pair dans un hôpital psychiatrique, près de Rouen. Elle nous explique ce qu’est le rôle de pair-aidante : mettre son expérience vécue du trouble psychique et du rétablissement au service du lien entre patients et soignants.
Zélie : Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir pair-aidante ?
Eva Mazur : À 26 ans, j’ai sombré dans une souffrance psychique aiguë dont je ne comprenais pas encore la nature. J’ai erré dans un système de soins de la santé mentale qui ne répondait pas à mes besoins d’écoute. Il m’a fallu plusieurs années pour trouver une aide adaptée et retrouver du sens.
Par la suite, j’ai décidé de m’engager professionnellement dans le champ de la santé mentale. J’avais été moi-même aidée par des pairs, qui avaient une expérience similaire à la mienne. Cela m’avait éclairée dans mon processus de rétablissement. Je suis donc devenue médiatrice de santé pair dans un hôpital psychiatrique. Je suis également formatrice indépendante sur la santé mentale, la pair-aidance et le rétablissement.
Qu’avez-vous appris dans votre formation de pair-aidante ?
Ma formation est un programme du Centre collaborateur de l’OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS). Il s’agit d’une licence générale en « Sciences Sanitaire et Sociale parcours Médiateur de Santé-Pair » dispensée par l’université Paris-XIII. Depuis 2012, environ 300 médiateurs de santé pairs ont été formés dans le cadre de cette licence. C’est un métier assez récent. La pair-aidance se pratique aussi de manière bénévole, sans avoir nécessairement suivi une formation universitaire.
Lors de cette formation, j’ai notamment réfléchi à la philosophie du rétablissement, qui consiste à ce qu’aucune décision, médicale ou non, ne soit prise sans le consentement de la personne concernée : « Jamais rien sur nous sans nous ». Nous sommes des personnes, et non des diagnostics.
Quelles missions avez-vous à l’hôpital ?
Je travaille dans une unité de soins, avec une équipe pluridisciplinaire. Cela peut prendre plusieurs formes : entretiens individuels d’une heure environ, activités de groupe, participation aux réunions d’équipe, ou encore formation des soignants. Un de mes objectifs est de faire en sorte que la parole des personnes concernées soit bien entendue, et ainsi de favoriser l’alliance thérapeutique.
Par exemple, un jour, une personne avait mal vécu les propos d’un médecin. Nous avons pu organiser une rencontre à trois pour que les choses soient dites de manière apaisée et constructive. Le fait d’avoir traversé des troubles psychiques me permet de mieux comprendre les difficultés de la personne.
Ainsi, quand on a l’expérience intime de la souffrance, on sait qu’il est plus difficile d’être en lien avec les autres, et de mémoriser. Plutôt que de dire que « la personne ne fait pas d’efforts » ou que c’est de sa faute, on complète les hypothèses : le frein est souvent lié à ses symptômes.
Pourriez-vous nous parler d’une rencontre qui vous a marquée ?
Je pense à une personne qui aimait beaucoup l’écriture. Elle était dans une phase de détresse psychique. Dans mon travail, je me demande comment les valeurs du rétablissement – auto-détermination, identité, lien, sens et espoir - peuvent se déployer chez la personne accompagnée.
Je lui ai donc proposé d’écrire un poème sur l’espoir avec les membres de l’équipe. Nous avons ensuite co-construit un atelier avec elle sur ce thème à l’hôpital. Même face à une situation de grande souffrance psychique, il est possible d’être force de proposition autour de ces valeurs-clés.
Vous avez co-publié un livre, Aider. Les clefs pour apprendre à observer, écouter, accompagner (Michel Lafon). Quels messages vouliez-vous transmettre ?
Quand on a un proche qui va mal, on se sent souvent très impuissant et démuni. Je voulais transmettre quelques bases d’aide, ainsi que des ressources sur le système de santé mentale. Cela nous concerne tous. Propos recueillis par Solange Pinilla
Lire d'autres articles du dossier "Quand la santé mentale est fragile" dans Zélie n°109 - Novembre 2025, à télécharger gratuitement.
Photo (c) Collection particulière




![[Témoignage] Surmonter la dépression en couple](https://static.wixstatic.com/media/ed7b83_58550c2aedc7407abae4ed6c335dbb10~mv2.jpg/v1/fill/w_380,h_250,fp_0.50_0.50,q_30,blur_30,enc_avif,quality_auto/ed7b83_58550c2aedc7407abae4ed6c335dbb10~mv2.webp)
![[Témoignage] Surmonter la dépression en couple](https://static.wixstatic.com/media/ed7b83_58550c2aedc7407abae4ed6c335dbb10~mv2.jpg/v1/fill/w_38,h_25,fp_0.50_0.50,q_90,enc_avif,quality_auto/ed7b83_58550c2aedc7407abae4ed6c335dbb10~mv2.webp)
















Commentaires