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Charlotte Bruneteau, face à la maladie psychique de son mari




Le choix d’un saint patron influe-t-il sur notre destinée ? Interviewer Charlotte, c’est n’en pas douter ! De la doyenne des Carmélites de Compiègne, martyre sur l’échafaud révolutionnaire, elle a hérité une fermeté dans la foi qui force l’admiration.


Certes, elle a grandi dans un climat imprégné de christianisme ; certes, elle croit ardemment aux grâces du sacrement de mariage... Mais qui est préparé à affronter la maladie psychique de son conjoint quand elle déboule sans crier gare ? Car ce n’est qu’une dizaine d’années après avoir épousé Marc que Charlotte, déjà mère de 5 enfants, voit sa vie vaciller.


« Un dîner avait suffi pour que je tombe sous le charme de ce militaire charismatique et drôle dont le caractère entier et les idéaux s’accordaient parfaitement avec mes aspirations », se souvient la quadragénaire à la chevelure d’ébène. Mariage en 2006, fréquents déménagements, arrivée des enfants : le couple est heureux, malgré l’immense peine née du suicide du frère de Marc en 2009. Ce dernier a une propension à trop boire en soirée qui irrite sa bien-aimée, mais elle ne s’en inquiète pas outre mesure.


C’est en 2015 que ce penchant devient problématique : le stress né de sa reconversion dans le civil et des traumatismes enfouis (éprouvante mission en Afghanistan, alcoolisme de son père) conduisent Marc à abuser de la boisson. « Le climat familial est devenu très tendu, se désole Charlotte. Mon mari déversait sur moi son mal-être. Quand il a résolu de voir un alcoologue, j’ai applaudi des deux mains. »


Était-ce en catimini au vu du tabou pesant sur le sujet dans le milieu catholique ? Charlotte plonge dans les vôtres ses yeux bleu azur qui respirent la franchise : « Je déteste les faux-semblants. Seuls m’importaient l’équilibre familial et mon désir de soutenir ma moitié, quoi qu’il arrive. » D’une belle humilité, le père de famille rejoint un groupe d’alcooliques catholiques et entame un chemin de sevrage. Avant d’être stoppé dans son élan en apprenant que sa dépendance à la boisson est le symptôme d’une maladie psychique : la bipolarité - succession de phases de neurasthénie et de phases d’euphorie décuplant le potentiel du malade.


Commence alors pour sa famille un long chemin de croix qui dure environ 8 ans : déni, tâtonnements dans le traitement médicamenteux, rechutes répétées qui happent Marc vers le fond et le rendent infernal les soirs d’ébriété. « En 2020, c’était l’horreur, confesse sa femme. Violence verbale, colères terribles, agressivité continue. Je vivais dans l’angoisse. » Elle se raccroche à sa foi, ses amis, son beau-frère, très proche de son époux. Le recours à un conseiller conjugal fluidifie la communication avec ce dernier mais ne résout pas le fond du problème.


L’horizon s’éclaircit quand Marc accepte enfin, après moult résistances, de se faire hospitaliser. Il faudra cinq séjours successifs pour que son état se stabilise, en 2022. Une longue traversée du désert pour Charlotte, secouée en parallèle par d’autres évènements : la découverte d’une tumeur - finalement bénigne - chez leur fille de 4 ans et demi et une grossesse surprise.


L’épouse malmenée se souvient de ce qui lui a été dit lors de leur préparation : dans les remous de la vie conjugale, les sentiments s’évanouissent et la volonté prend le relais. « J’ai décidé, affirme-t-elle, de rechoisir Marc tous les matins, même si je ne me sentais plus amoureuse. » Elle s’appuie sur les itinéraires de couples catholiques inspirants : Louis et Zélie Martin, Cyprien et Daphrose Rugamba, Tomas et Paquita Alvira, ou plus près d’elle Sophie Barut dont le témoignage Je rentrerai avant la nuit (2018) l’a marquée (à ce sujet, notre article « Sophie Barut, auteur et sculpteur »).



Ses oasis ? L’amour de ses proches et son intimité avec Dieu, qui va croissant : « J’ai songé à quitter Marc pour protéger les enfants, avoue-t-elle. J’ai supplié le Seigneur de me faire connaître Sa volonté. "Ce que je veux pour Toi, m’a-t-Il répondu, c’est la sanctification dans le mariage." »


Maintenant que son homme est abstinent et plus constant d’humeur, Charlotte revit, s’investit à plein dans le catéchisme pour enfants et adultes et rêve de reprendre un jour son métier d’infirmière. En attendant, avec Marc, ils se consacrent à la promotion du livre que vient d’écrire ce dernier, L’amour me relève chaque jour (Mame), et à l’accompagnement de couples dans leur situation : « Très soudés par l’épreuve, nous avons à cœur de partager notre expérience et notre Espérance. » Raphaëlle Coquebert



Questionnaire de Proust revisité


Une odeur de votre enfance ?

Les sous-bois auvergnats quand j’allais aux champignons avec mon grand-père.


Le must de votre garde-robe ?

Le jean brut slim.


Un rituel pour se détendre ?

Un bain brûlant avec un magazine de cuisine.


Ce qui vous fait vous lever le matin ?

L’envie de rendre agréable la journée de mon mari et de mes enfants.


Votre plus grande fierté ?

La famille que j’ai fondée.


Le livre que vous lisez en ce moment ?

Au pas de Dieu, une biographie de saint Josémaria Escrivá. Son appel à sanctifier le quotidien me rejoint dans mon état de mère au foyer.


Un moment rituel avec votre mari ?

L’apéro au coin du feu les vendredis et samedis soirs.


Une phrase qui vous aide à tenir ?

Sursum corda. Quand le découragement pointe son nez, elle me secoue : courage, on y va !


Votre remède en cas de blues ?

Une émission de cuisine (Top Chef, Le Meilleur Pâtissier) ou une série policière (Castle, Balthazar).


Votre prière préférée ?

« Oh ! Jésus, je m’abandonne à Toi, c’est à Toi d’y penser » du prêtre en voie de béatification Don Dolindo Ruotolo.


Votre sainte préférée ?

La Vierge, modèle de mère et médiatrice n°1 auprès du Fils.


L’hiver pour vous rime avec... ?

Cocooning et coin du feu.


Propos recueillis par R. C.




(Photo © Raphaëlle Coquebert)

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