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Édith Stein, philosophe et carmélite



En 1999, sainte Édith Stein a été proclamée co-patronne de l’Europe avec sainte Catherine de Sienne et sainte Brigitte de Suède. Édith Stein, dernière d’une famille juive de onze enfants dont quatre moururent en bas âge, est placée sous le signe de Dieu dès son entrée dans le monde. Elle naît le 12 octobre 1891, jour de la solennité israélite majeure de Yom Kippour.

Orpheline de père à 3 ans, marquée par le suicide de deux oncles après leur faillite, elle est élevée dans une fidèle observance juive, par une mère héroïque tenant seule la maison et l’entreprise familiale à Breslau, en Prusse. Juive de foi et Prussienne de cœur, Édith Stein fait de la maîtrise de soi, ce qu’elle appelle « se tenir en main » pour pouvoir se donner, une colonne vertébrale.

Mais progressivement sa vie prend un tournant inattendu pour elle et les siens. A 15 ans, après un voyage à Hambourg, elle s’éloigne de la foi en Dieu. Bachelière en 1911, elle entre à la faculté de Breslau, se distingue par sa vigueur intellectuelle, participe à des sociétés de secours et d’instruction populaire et milite pour les droits des femmes.

C’est également sur les bancs de l’université qu’elle découvre le courant de la phénoménologie de Husserl. Au printemps 1913, elle rejoint justement ses cours à Göttingen. Là, elle se lie avec le couple Pauline et Adolf Reinach, philosophes juifs en chemin vers une conversion au protestantisme.

Avec la déclaration de guerre, elle entre au service de la Croix-Rouge, est affectée en Autriche où elle soigne les blessés jusqu’en 1916. Dans le milieu philosophique phénoménologiste qu’elle fréquente à Göttingen, les conversions au christianisme se multiplient. Celle d’Adolf Reinach, puis la mort de celui-ci au front, la bouleversent. Par ailleurs, la lecture des œuvres de sainte Thérèse d’Avila lui trace des voies nouvelles.

Elle demande et reçoit le baptême dans la religion catholique le 1er janvier 1922. Dans la foulée elle exprime son souhait de rentrer au carmel. Mais son directeur spirituel le lui refuse. Elle est embauchée au lycée Sainte Magdalena de Spire, chez les dominicaines, où elle enseigne la littérature allemande et l’histoire. Dans cet environnement porteur, elle suit la liturgie des heures et la messe quotidienne, mais aussi traduit les œuvres du cardinal Newman et de saint Thomas d’Aquin.

Sa vie philosophique reste dense, avec plusieurs publications, sur la vocation féminine ou encore sur l’État. Sa réputation est grande et elle est la seule femme invitée aux semaines universitaires de Salzbourg. En 1932, elle rejoint un poste universitaire à Munster. Mais dès la prise de pouvoir de Hitler, elle comprend que ni elle, ni aucun juif n’a plus sa place en Allemagne.

Elle demande audience au pape Pie XI, puis lui écrit pour le mettre en garde contre l’antisémitisme et le paganisme antichrétien du nazisme. Parallèlement, elle obtient l’accomplissement de son désir et entre au carmel de Cologne en octobre 1933. Pour autant, elle se sent solidaire des juifs et écrit : « Le destin de ce peuple est le mien ». Le temps de noviciat est marqué de duretés. Mais dès avril 1935, le provincial des carmes demande à celle qui est devenue sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix de reprendre les études philosophiques et l’écriture.

Cependant, l’étau se resserre sur les juifs et, en 1938, après les saccages de la Nuit de cristal, elle part pour un carmel néerlandais. Après l’invasion des Pays-Bas, elle demande un visa pour la Suisse. Mais le 2 août 1942, elle est arrêtée, avec sa sœur Rosa – convertie également au catholicisme –, et déportée à Auschwitz le 9 août 1942. Les femmes du convoi sont immédiatement gazées.

L’œuvre d’Édith Stein, sur la phénoménologie, la vocation féminine ou encore le mystère de la Croix, est majeure. Ses vertus lui valurent la béatification en 1987, puis la canonisation en 1998. Gabriel Privat

Crédit photo Wikimedia commons CC


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