top of page

Le combat spirituel en 4 questions



Cet article est extrait de Zélie n°93 - Mars 2024, à découvrir gratuitement.



Lorsque vous avez été baptisée – jeune enfant ou adulte -, un exorcisme a été prononcé, lors du baptême ou des scrutins. Il s’agit d’une prière pour délivrer la personne de l’influence du démon due au péché originel et à ouvrir à la grâce de Dieu. Mais aussi de demander de la force dans le combat spirituel. De quoi s’agit-il ?



1 Le combat spirituel : de quoi parle-t-on ?


Dans son exhortation apostolique Gaudete et exsultate, le pape François nous rappelle que la vie chrétienne est un combat qui demande vigilance et discernement. Il distingue trois types de combats spirituels, qu’énumérait déjà sainte Catherine de Sienne dans une lettre à la reine Jeanne de Naples : contre la mentalité d’une vision sans Dieu qui mène à la médiocrité – ce qu’on appelle « le monde » au sens spirituel - ; contre ses propres fragilités et inclinations - « chacun a la sienne : la paresse, la luxure, l’envie, la jalousie, entre autres », précise le pape ; enfin, contre le diable qui est le prince du mal.


Évidemment, depuis quelques décennies, les démons et les anges – les démons étant des anges « qui ont mal tourné » - sont peu évoqués, voire leur existence niée (lire aussi l’article « Qui sont les anges ? »). On voit le diable comme un symbole, une personnification du mal.


Pourtant, la Bible est remplie de références aux démons. En voici une parmi d’autres, que rappelle le pape dans Gaudete et exsultate : « Quand Jésus nous a enseigné le Notre Père, il a demandé que nous terminions en demandant au Père de nous délivrer du Mal. Le terme utilisé ici ne se réfère pas au mal abstrait et sa traduction plus précise est “le Malin”. Il désigne un être personnel qui nous harcèle. Jésus nous a enseigné à demander tous les jours cette délivrance pour que son pouvoir ne nous domine pas ».


Une des ruses du démon est de faire croire qu’il n’existe pas. Mais soyons confiants : Jésus a déjà vaincu Satan, il nous propose de collaborer à cette victoire.


2 Quelle image pourrait incarner le combat spirituel ?


Le Père Guy-Emmanuel Cariot, prêtre exorciste du diocèse de Pontoise, dans son livre La citadelle imprenable. Petite méthode pour résister à l’ennemi et obtenir la libération (Mame), propose une métaphore parlante. Il imagine notre vie comme une petite cité fortifiée, dont différentes constructions symbolisent différents aspects de notre vie.


La ferme incarne notre vie professionnelle - ou de nos activités - ou encore nos études. Le salon représente notre vie familiale. Le réfectoire, lui, symbolise notre rapport à la nourriture. La chambre évoque le lieu de l’intimité personnelle et notre sexualité. La bibliothèque est le siège de la vie intellectuelle, des idées et des réflexions. Quant au théâtre, il est le lieu de notre imagination. La salle des cartes est la pièce du discernement, des choix et des engagements. L’église du village constitue le siège de notre relation à Dieu. Enfin, le neuvième bâtiment est le château lui-même, le lieu d’habitation de Dieu en nous.


Dans cette « théorie du château », Guy-Emmanuel Cariot suggère d’imaginer sa ville, entourée d’un rempart qui en assure l’unité. Ensuite, de se visualiser en gardien en haut des remparts : « Si nous ne veillons pas à la garde de notre ville, personne ne le fera ».


On peut faire le tour des différents bâtiments, puis contempler au centre le palais de Dieu gardé par des anges. Cette maison resplendissante, celle de Dieu, à l’intérieur de laquelle on peut imaginer aussi la maison de la Vierge Marie et la maison qui est notre âme, sont inaccessibles à l’ennemi.

« Le démon est limité dans son action, rappelle Guy-Emmanuel Cariot. Il a un pouvoir sur le corps et l’imagination, puisqu’il est un pur esprit. Mais il ne peut conquérir ma liberté si je ne décide pas moi-même de la lui livrer. »


Lorsque le démon attaque, par une tentation le plus souvent, la réponse proposée est celle-ci : dès qu’on l’aperçoit au loin, tourner le dos à l’ennemi et se retourner vers l’intérieur du château, vers la maison de Dieu. On peut par exemple lui adresser ces deux prières : « Mon Dieu, je vous adore de tout mon cœur » et demander de l’aide au Seigneur : « Viens à mon aide, sauve-moi ; ne lui permets pas d’entrer et repousse-le ! » Et si des soldats de l’ennemi ont quand même pénétré la cour du village, on peut continuer à prier.


Lorsque l’attaque a été détournée, il faudra rendre grâce au Seigneur. L’intérêt de cette méthode est de ne pas parler à l’ennemi, qui sait exploiter nos failles – seule une âme pure comme le Père Hamel a pu dire en mourant « Va-t’en Satan ! » -, mais de demander à Dieu de le chasser.

3 Comment le démon nous attaque-t-il ?


De manière ordinaire, le démon agit grâce à la tentation : souvent, une suggestion agréable en apparence, qui vise à nous détourner de Dieu. « La raison de l’homme va être obscurcie jusqu’à s’agenouiller devant l’objet de la tentation », explique Guy-Emmanuel Cariot.


Quand une tentation devient un péché qui se reproduit de manière répétée, elle devient une habitude et donc un vice. « La personne cédant sans cesse et sans résistance au péché conclut implicitement comme une alliance avec l’ennemi. La porte du pont-levis reste baissée et l’ennemi entre au village quand il veut ».


Heureusement, Dieu nous appelle sans cesse à venir lui demander pardon par le sacrement de réconciliation et nous donner la force de ne plus recommencer. Ajoutons que si le vice est associé à une addiction ou une fragilité psychique, une aide médicale ou psychologique pourra être précieuse.


Plus rarement, le démon peut également attaquer de manière « extraordinaire » : cette fois, ce n’est pas par la séduction, mais par une attaque plus ou moins violente.


Le Père Cariot, exorciste, en distingue quatre : la vexation diabolique – qui peut s’exprimer par des troubles physiques, mentaux, spirituels - ; l’obsession diabolique, qui se traduit par des attaques brutales, des pensées obsessionnelles, des tentations de suicide ; la possession diabolique, où le démon semble posséder le corps, le faisant agir et parler à sa guise, la victime ne pouvant à certains moments lui résister ; enfin, l’infestation diabolique concerne non pas les humains, mais les animaux, les objets et les maisons : objets qui bougent tout seuls, bruits nocturnes...


Bien sûr, dans tous ces cas de phénomènes extraordinaires, si l’on s’interroge, mieux vaut s’adresser à l’exorciste diocésain, pour savoir si ce qu’on subit relève d’une attaque diabolique ou non.


Il existe également deux types d’actions extraordinaires du démon, évoquées par le Père Sébastien Coudroy dans Progresser vers Dieu. La sainteté en 7 étapes (Emmanuel). Il peut provoquer une guérison à travers un « medium » ou « guérisseur », mais avec un prix à payer : la douleur disparaît généralement, mais un peu plus tard, un autre mal apparaît, qu’il soit physique, psychique ou spirituel, encore plus grave. Le Père Coudroy a entendu le témoignage de plusieurs personnes l’ayant vécu.


Dieu condamne ce genre de consultation, comme on le voit par exemple dans le livre du Deutéronome : « On ne trouvera chez toi personne qui fasse passer son fils ou sa fille par le feu, personne qui scrute les présages, ou pratique astrologie, incantation, enchantement, personne qui use de magie, interroge les spectres et les esprits, ou consulte les morts. Car quiconque fait cela est en abomination pour le Seigneur » (Dt 18, 10-13).


Autre cas de ruse du démon : il imite une grâce extraordinaire pour semer le doute. Par exemple, un jeune sur le point d’entrer au séminaire tombe sur une bible ouverte au psaume : « Tu es prêtre à jamais selon l’ordre du roi Melkisédek ». Il y voit la confirmation de son appel. Mais ses parents s’y opposent. à nouveau devant une bible ouverte, le démon lui présente le passage : « Vous, les enfants, obéissez à vos parents dans le Seigneur, car c’est cela qui est juste ». Le jeune est troublé, prenant en compte ces « signes » extérieurs de manière excessive, au dépens de son discernement personnel.


4 Quelles armes pour le combat spirituel ?


Le pape François évoque cela dans Gaudete et exsultate : « Nous avons pour le combat les armes puissantes que le Seigneur nous donne : la foi qui s’exprime dans la prière, la méditation de la parole de Dieu, la célébration de la Messe, l’adoration eucharistique, la réconciliation sacramentelle, les œuvres de charité, la vie communautaire et l’engagement missionnaire. Si nous nous négligeons, les fausses promesses du mal nous séduiront facilement ».


Don Louis-Hervé Guiny, dans Un chemin de liberté pour tous. Le combat spirituel (Mame), donne également d’autres conseils concrets pour progresser : se donner chaque jour un effort et en faire une petite victoire, prier le chapelet, avoir un accompagnateur spirituel, demander la grâce de la fidélité, faire un pèlerinage, rendre grâces... (voir aussi les témoignages en pages 16 et 17 de Zélie n°93)


On peut identifier son péché le plus fréquent - orgueil, paresse, désespérance, égoïsme... - et noter deux actions concrètes pour ne plus y succomber. Si j’ai tendance à tomber dans l’orgueil, je peux demander pardon à ceux que j’ai offensés, ou pratiquer l’autodérision, avec humour. De manière générale, mieux vaut éviter les lieux et occasions qui sont, pour nous, propices aux tentations.


Soyons dans l’espérance ! « Cette lutte est très belle, car elle nous permet de célébrer chaque fois le Seigneur vainqueur dans notre vie », dit le pape François. La conversion in extremis du Bon Larron sur la croix est un témoignage parlant. Solange Pinilla



Photo Unsplash

Derniers articles
bottom of page