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Quand les enfants quittent le nid


Que les enfants soient petits ou grands, prendre conscience qu’ils doivent partir un jour permet de mieux se préparer à leur absence future. Emmanuelle Riblier, conseillère conjugale et familiale au cabinet Raphaël, nous éclaire.

En quoi le départ des enfants, et particulièrement du dernier - qu’il parte faire ses études ou s’installer dans sa vie d’adulte -, est-il un processus de séparation et donc de deuil ?

C’est la clôture d’un temps, d’une étape de vie. L’enfance des enfants se termine et ce ne sera plus jamais comme avant. Lorsque les enfants sont jeunes, c’est un temps chargé en affectif, en « nourriture affective ». Quand ils partent, le rôle du parent comme personne-ressource se modifie et s’estompe. Cependant, il est important que ce temps soit vécu comme une séparation - qui permet une croissance – et non comme une rupture, plus négative.

Comment préparer cette étape ?

Il faut le faire dès la naissance ! L’enfant qui naît est appelé à partir. « Vos enfants ne sont pas vos enfants, ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même », selon les célèbres mots de Khalil Gibran. Quand on est de jeunes parents, on a l’impression que les enfants seront toujours là. Se préparer à l’étape de la séparation dans son cœur permet de ne pas la vivre comme un abandon. Si c’est le cas, c’est que le lien n’était pas ajusté. Mieux vaut ne pas faire comprendre à l’enfant que l’on est la victime et lui le bourreau qui va l’abandonner ; mais plutôt lui dire et lui montrer ceci : « J’ai des centres d’intérêt et des ressourcements autres que toi ».

Avant le départ des enfants, il faut envisager ce qui va nous nourrir et nourrir notre couple. Par exemple, deux ans auparavant, parler ensemble du nid vide, réfléchir à sa vie professionnelle, à ses activités...

Est-ce une bonne idée de créer un rituel pour marquer ce passage : dîner d’adieu, échanges de cadeaux ?

C’est une bonne idée et c’est le fruit de la créativité de la famille ! Cependant, cela dépend de l’ambiance familiale : il faut que ce rituel soit positif et fluide.

Est-il préférable de prendre le temps de la tristesse ou d’enchaîner sur des activités pour combler le vide ?

Il y a une période de tristesse à traverser, en effet. Mais il ne faut pas s’y installer. D’autre part, les activités n’ont pas pour but de combler un vide ou d’entrer dans une dynamique de réparation. Si elles donnent une valorisation et une identité, c’est qu’elles sont chargées de trop d’attentes. Il est important de faire une relecture pour se demander comment l’on nourrit ses besoins.

Quels moyens permettent de lâcher prise et de laisser les enfants prendre leur indépendance ?

On peut se replonger dans la confiance que l’on fait à ses enfants, en leur capacité à grandir et croire qu’ils peuvent puiser dans leurs ressources. C’est l’occasion de purifier ce qui peut être intrusif et captatif dans notre amour parental ; on peut soutenir ce lâcher-prise par un accompagnement spirituel.

Certains parents subissent le « syndrome du nid vide », une forme de vraie dépression au départ du dernier enfant. Que révèle leur douleur ?

La place de l’enfant n’était peut-être pas ajustée dans la dynamique parentale. Je vois aussi de nombreuses personnes chez qui le couple parental a pris toute la place, et le couple conjugal a été laissé de côté. Pourtant, le couple parental n’a de raison d’être que parce qu’il y a une alliance conjugale. C’est le moment de revivifier celle-ci.

Du côté des enfants, comment favoriser une bonne séparation ?

Ils doivent vivre cette étape sans culpabilité, et ne pas rentrer dans une fausse dette de loyauté envers leurs parents. Certains enfants renoncent à partir pour cette raison, notamment dans les familles monoparentales. Partir n’empêche pas d’entretenir le lien, par des photos ou des appels.

Les mères au foyer, qui ont consacré de nombreuses années à plein temps pour leurs enfants, souffrent-elles davantage de leur départ ?

Voir les murs vides peut en effet les marquer davantage que les mères qui travaillent à l’extérieur. Chez celles-ci, l’appartenance professionnelle demeure. Ainsi, je conseille de nombreuses femmes que j’accompagne dans les Yvelines à aller voir l’association Envol 78, qui aide des femmes qui n’ont jamais eu d’activité professionnelle à faire un bilan de compétences et à se positionner à nouveau dans le monde du travail. Propos recueillis par Elise Tablé

Lire le reste de Zélie n°39 - Mars 2019


Crédit photo Free-Photos/Pixabay License

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